I never said that I was brave [Coline]

On était en début mai, et l'air était délicieusement doux, à Paris. La chaleur n'était pas encore accablante, comme elle le serait d'ici un mois, à l'époque où les futurs bacheliers quitteraient les bistros et les parcs pour s'enfermer dans leurs chambres réviser leur bachot. Une brise légère rendait la température parfaite sur les quais de la Seine. Les pêcheurs de loisirs profitaient encore d'un fleuve pas trop pollué, et quelques parisiens aussi joyeusement inspirés de Guillemot se promenaient au bord de l'eau. Les couleurs des robes à la taille haute étaient vives. On reconnaissait les nostalgiques de l'avant-guerre à leur chapeau haut-de-forme, et les ouvriers en pause à leur casquette. Quelques grands adolescents dessinaient le quai d'Orsay, en face : c'était sans doute un atelier des Beaux-Arts. Le jeune homme les regarde d'un air jaloux pendant quelques secondes, avant de détourner le regard quand un étudiant le remarque. Il s'éloigne un peu, sortant un paquet de tabac de sa poche. S'installe au bord du quai, les jambes dans le vide, il commence à se rouler une cigarette, sans plus prêter attention à rien d'autre.

Son travail manuel achevé - le seul, d'ailleurs, qu'il soit capable de mener à bien -, le jeune homme se met à la recherche de son paquet d'allumettes. Ah ! Le voilà. Cigarette allumée, il balance le petit bout de bois dans l'eau, et se penche en arrière, fumant et profitant du début de l'été. On sent déjà l'excitation monter à Paris, depuis quelques semaines. La vague révolutionnaire qu'il sent venir, qu'il attend même, remplit de satisfaction son lui politique. Enfin du changement dans ce pays ! Enfin des problèmes pour ce vieux de Gaulle, partisan d'une France tirée en arrière, trop traditionnelle, trop soumise à ce maudit plan Marshall !

Coline avait décidé d'aller dessiner aujourd'hui, il faisait soleil, et les lumières seraient parfaites en cette fin d'après-midi. Son bloc sous le bras, son sépia, son blanc et sa gomme mie de pain fourrés dans sa trousse, elle-même fourrée dans son sac à fleur en bandolière.
La jeune femme adorait littéralement les journées comme celle-ci. Bientôt, c'est elle qui serait à la place des étudiants en arts, tous alignés sur le quai à dessiner le Louvre qui leur faisait face. Pour sa part, la jeune femme avait decidé de dessiner les touristes en nombres sur le quai, les jeunes leurs guitares et leurs chants révolutionnaires, les couples ... Bref, les passants. Elle avait déjà dessiné un couple à qui elle avait offert le dessin. Oui, ils lui avaient un peu pris la tête pour l'avoir, et ça la dérangeait pas. CRASH ! Elle l'avait arraché et gentiment donné à la belle brune dont les yeux étaient parfaitement assortis a tee-shirt vert de son copain. Une autre page était quant à elle remplit par un vaste groupe de jeunes, tous une guitare ou un djembé au bout des doigts, celui là, elle le gardait, elle le trouvait très représentatif de l'ambiance actuelle de Paris, et elle aimait ça.
La blondinette s'arrêta une nouvelle fois à la vu d'un jeune homme en train de rouler sa cigarette. Elle le croqua rapidement car elle savait sa pose éphémère. Lorsqu'il fut à moitier allongé sur le quai, elle pu prendre son temps pour le dessiner. Biensûr, elle remarqua qu'il était mignon en le dessinant mais il ne fallait pas commencer à baver, sinon on finissait jamais les dessins et en plus, les gars étaient bien trop content de voir les filles bavaient devant leur chevelure en bataille ou leur dégaine et leur esprit 'révolutionnaire'... Et elle aimait pas satisfaire les gens, enfin pas aussi facilement.

Brusquement, le jeune homme se rassied. Il avait passé les cinq dernières minutes à écouter les improvisations d'un groupe d'étudiants, musiciens à leurs heures perdues. Leur musique était agréable, très dans le temps, et le jeune homme ne pouvait s'empêcher d'oublier un peu ses pensées politiquement incorrectes pour l'époque. Il s'était rassit soudain, parce qu'il détestait l'impression qu'il avait d'être entouré d'artiste, alors que lui ne faisait prendre le soleil, aux yeux des autres.

Ramenant ses jambes et les croisant sur le sol, il coince sa cigarette entre ses lèvres, et tire un petit calepin de la poche de sa chemise en lin. Un crayon y était fixé, et s'en détache alors que le garçon l'ouvre. Sur la première page, son écriture maladroite disait : 'Guillemot, fils de collabo assassiné, parisien aux idées." Il regarde rapidement cette phrase, qu'il avait écrite, saoule, la nuit du jour où il avait acheté le petit cahier. Après un mouvement du regard las, il tourne les pages jusqu'à en trouver une vierge. La mine de son crayon se pose dessus, et attend que sa main lui fasse la dictée. Quelques minutes plus tard, il ferme le cahier, dans lequel il n'aura réussit qu'à noter la date et le lieu. Il lève la tête. Le soleil l'éblouit, et il détourne le visage, pour aviser une jeune femme, à une dizaine de mètre de lui. Orientée vers lui, elle dessine rapidement, à coups de crayon concis. Très concentrée, elle ne lève pas le regard souvent. Guillemot la fixe, attendant qu'elle regarde de nouveau son model. Si c'était lui ?

Coline avait les yeux rivés sur son bloc, elle se mordillait légèrement la lèvre, signe de grande concentration chez la jeune femme. Elle avait déjà commencé à ombrer son dessin bien que tous les détails ni soient pas. Lorsqu'elle releva le regard rapidement, elle constata que le jeune homme devant elle avait bougé. Elle poussa un long soupire et alors qu'il la regardait, elle lui fit signe de reprendre sa place initiale avec un petit sourire voulant dire 's'il te plait'. Elle n'avait pas grand espoir qu'il accepte cependant elle fixa son regard dans celui du jeune homme, attendant quelque chose qui n'arriverai peut être jamais en fait.
Le soleil frappait légèrement sur l'épaule maintenant dénudée de la jeune femme. Elle portait un jean, une chemise bien trop grande car piquée dans l'armoire de son jumeau le matin même. Ca faisait plus d'une semaine qu'elle ne l'avait pas vu, et elle commençait à ressentir un peu le manque, comme pour une drogue douce, rien de violent, mais quelque chose qui vous rend légèrement triste et à cran. Alors cette chemise, elle l'avait prise pour avoir l'odeur de son insolant de frère sur elle. Mais bien trop grande pour elle, la manche tombait de son épaule, la laissant à la merci du soleil.

La jeune femme lève finalement le regard. Bleu. C'est lui qu'elle regarde, avec un air concentré, qui se défait rapidement. Le jeune homme devine que c'était bien lui qu'elle dessinait, et esquisse un petit sourire amusé. Il est pourtant surpris : ce n'est ni de la gêne, ni même de la surprise qu'il peut lire sur le visage de la jeune femme. Si elle en ressent, elle le cache bien, car tout ce qu'il peut voir, c'est de la déception : son modèle a bougé, son dessin est foutu. Son air désappointé disparait pourtant assez rapidement, pour laisser place à une petite moue, sinon suppliante, qui indique au garçon qu'elle aimerait bien qu'il reprenne sa position initiale.

Le jeune homme reste immobile, un air flegmatique et un peu narquois sur le visage. Le seul mouvement de l'image est produit par le vent, qui s'est introduit dans ses cheveux, dressés sur sa tête, faisant de douces vagues, aussi flegmatiques de le garçon. Conscient d'être incroyable insolent et à peine correct, Guillemot dévisage la jeune femme, toujours immobile. Son visage, pourtant banal, est éclairé par le bleu des yeux et la pâleur de la peau de l'artiste. Ses cheveux blonds, attachés en arrière, terminent de donner à la jeune femme un air très nordique. Le regard du lycéen glisse sur l'épaule dénudée de la jeune femme. Le pâleur de la peau lui permet de briller avec intensité sous le rayon du soleil, accentuant sa blancheur. Lentement, Guillemot reprend place, tachant de se mettre exactement comme il l'était quelques instants auparavant. Il ne regarde plus la jeune femme, mais un sourire de celui qui joue au fin étire ses lèvres alors qu'il regarde les bâtiments d'en face, et qu'il dit :

- Tu vas te brûler, peau de pêche.

Coline soupire satisfaite quand il reprend sa position initiale, elle se reconcentre rapidement, et recommnce à mordiller sa lèvre. Son père la suppliait sans arrêt d'arrêter de se modre la lèvre ainsi, il avait peur qu'elle finisse par se la couper ou quelque chose comme ça, mais ce tic qu'avait la jeune femme ne faisait que s'intensifiait au fur et à mesure qu'elle vieillissait, et elle s'en contre balancait de finir par se faire saigner. Elle sourit à la remarque du jeune homme. Personne ne l'avait jamais appelé 'Peau de pêche' pour cause elle ne se trouvait pas spécialement blanche, mais bon.

"Je ne pense pas."

Se contenta-t-elle de répondre à sa remarque., et elle le pensait sincèrement. Au bout d'une demi-heure, la jeune femme avait mis la dernière touche à son dessin, une dernière lumière qui se baladait sur l'eau sombre du fleuve parisien. Elle se leva doucement, remis son sac à bandolière sur son épaule le temps de s'approcher près de son dernier modèle.

"Si tu le trouves pas trop moche, je te l'offre."

Lui indiqua-t-elle en lui mettant son bloc dans les mains. Le dessin, elle le trouvait plutôt réussit, mais elle n'était pas des plus objective étant donné que c'est elle qui avait dessiné, et elle en avait conscience, pourtant elle était assez fière malgrè surment quelques erreur de-ci, de-là. Tandis que le jeune homme observait son dessin, la jeune femme rejeta sa tête en arrière pour prendre le soleil, ses jambes se balançant dans le vide, les yeux fermés et c'est sans les ouvrir qu'elle ajouta.

"Merci, d'avoir repris ta position initiale."

Dès qu'il reprit sa position initiale, Guillemot ressentit le besoin de sautiller. De bouger, de danser, de faire n'importer quoi. C'était étrange. Quand il était installé de la sorte naturellement, il se sentait parfaitement bien et ne tenait absolument pas à bouger. Maintenant qu'il savait qu'il devait faire aussi bien qu'il pouvait pour ne pas changer de position, le dos lui grattait, ses fesses lui faisant mal, son pied semblait peser plus lourd dans le vide. C'est idiot, cette envie-besoin de n'en faire qu'à se tête, au point où une position ne vous est plus qu'agréable que quand vous êtes autorisés à bouger !

La jeune femme ne s'effarouche pas de son regarde, et répond posément à sa provocation. Le jeune homme laisse son sourire sur son visage mourir lentement, laissant ses yeux se fermer et ses pensées vadrouiller. Son bras d'appui tremble, et il s'empresse de le décaler de quelques millimètres. Les premières minutes lui sont insupportables, mais bientôt, le temps s'étire exponentiellement et perd de sa valeur. Son esprit se met à flotter sur de nouvelles eaux et il s'absente de son corps, laissant les minutes filer. La température, parfaite, lui facilite la tâche, et l'effort lui parait quasi-nul, quand la jeune femme le remercie et lui donne ainsi le feu vert pour bouger. Avec un petit "Ah..." qui lui échappe, le jeune homme se relève, et se roule une nouvelle cigarette. La jeune femme l'a rejoint, alors qu'il lèche le bord de sa feuille, pour le coller; Il allume la clope alors qu'elle lui tend le dessin, en lui disant qu'il peut le garder s'il le trouve assez bon. Avec un sourire qui dit le contraire, il répond :

- Tu rigoles ? C'est affreux ! D'abord, c'est un paysage, ou un portait ?

Il tourne le dessin, et s'arrête finalement dans le bon sens, avec un petit rire. La jeune femme à écrit, en petit, son prénom, pour signer. Il fronce les sourcils, puis se tourne vers l'artiste :

- Enchanté, Coline avec un seul 'l'. Je m'appelle Guillemot.

Elle reprit le bloc en levant le nez faussement hautain.

"C'est pas grave, je le garde alors, je l'aime bien moi."

Puis elle se remet dans sa position prévoyant un lézardage des plus passif devant ce soleil printannier qui n'a rien à envier à l'estival. L'épaule toujours à l'air et très légèrement rougit par les UV tout comme ses joues d'ailleurs mais ça aussi, elle s'en fiche.
Cependant elle priy quand même la peine de se tourner vers Guillemot quand il se présenta.

"Coline avec un seul 'l' est aussi enchantée, garçon qui pause pour une parfaite inconnue... "

Elle adressa un sourire malicieux au garçon avant de fermer de nouveau les yeux et de se tourner tel un tournesol vers le soleil. Tournesol, elle avait toujours adoré les tournesols ! Elle trouvait géniale qu'une fleur tourne avec le soleil, elle trouvait cette image très poétique et très féérique à la fois. En somme, pleine de charme.

"Que fait Guillemot sur les quais de Seine à part fumé, et poser pour une parfaite inconnue ?"

Guillemot sourit à la réponse, un peu surprenante dans la tournure, de la jeune femme. Il hausse un sourcil amusé, et son regard se pose de nouveau, inévitablement, sur l'épaule de la jeune femme. Elle est un peu rougie, comme le haut de ses joues. Le jeune homme avance sa main, rapidement, et appuie son doigt sur le haut l'épaule. Quand il l'enlève, il a laissé une marque blanche à milieu du rose soutenu de la peau légèrement brûlée :

- Je t'avais prévenue.

La jeune femme lui demande ce qu'il fait là, tout seul, sans occupation apparente, et le garçon lui répond avec un air de nouveau blasé :

- Je ne révise pas mon bachot; Je n'ai pas eu envie d'aller à la réunion à la Sorbonne. J'aime les quais, j'aime fumer.

Il marque une pause, puis ajoute avec un sourire Freedent, d'un air volontairement idiot :

- J'aime servir de modèle...

Il laisse échapper un rire, et tire une nouvelle fois sur sa cigarette, son regard se posant sur le bloc à dessin de la jeune femme. Il se sent piqué par la curiosité, et levant ses yeux aquatiques vers le regard de la jeune femme, tend la main vers les papiers qu'elle tient :

- Je peux ?

Coline tourna la tête vers son épaule lorsque le jeune homme beaucoup trop tenté appuya dessus pour laisser son empreinte blanche sur la peau légèrement brûlée de la jeune fille.
Bachot ?! Le jeune homme la rammena durment à la réalite. C'est vrai qu'elle aussi passait son BAC dans environ un mois, et que le travail ne manquait pas. Oh ! Et puis elle s'en fichait, c'est pas comme si elle n'était pas la tête de sa classe sans faire des efforts particuliers malgrè ce qu'en pensait son jumeau.

"Tu aimes servir de modèle ?! Vraiment, tu avais plutôt l'air de vouloir te gratter de partout."

Lui fit-elle remarquer avec un sourire moqueur. Puis elle accorda gracieusement son carnet au jeune homme. Biensûr, il y verrait deux dessins de lui, un croquis et celui ou il avait volontairement servit de modèle. Le dessin du groupe esquissé un peu plus tôt. Des dessins de Paris et ses monuments, et quelques divaguations de la jeune femme qui l'emmenaient tantôt dans la Rome antique ou bien dans le jardin d'Eden ... Dessins copiés sur ses manuels et réarrangést pour que ce soit du Coline.

Guillemot détourne le visage, un peu vexé que la jeune femme ait remarqué qu'il n'était pas à l'aise en posant. Il se pensait plus convaincant que ça ! Il oublie sa mauvaise humeur quand la jeune femme l'autorisa à regarder parmi ses dessins. Il commence par la fin, à savoir son propre portrait. Il le regarde avec un certain intérêt, ne s'étant pas concentré la première fois : il était bien trop occupé à faire l'imbécile. La jeune femme avait assez bien reproduit la forme de son corps, et le jeune homme reconnaissait sa morphologie de garçon touchant tout juste l'âge adulte. Son visage, pour autant, le décevait assez. Il tourne une petite grimace amusée vers la jeune femme et dit :

- Je n'ai pas un aussi gros nez !

Un peu narcissique, le Sorel ? Pas impossible. Du moins, c'était un coquet. Il tourne la page, et découvre avec une pointe de surprise une autre représentation de lui, plus rapide. La jeune femme à dut le croquer alors qu'il roulait sa cigarette, et le garçon ne se reconnait qu'à la forme caractéristique de sa veste, et à la chevelure folle du garçon du dessin. Une nouvelle fois, il se tourne vers la jeune femme avec un sourire charmeur :

- Eh, tu me l'avais caché, celui là..!

Riant doucement, il tourne encore la page, pour découvrir les musiciens. Il sourit, et, sans regarder Coline, la complimente sur le dessin, affirmant que celui-là était très réussit. Il continue de regarder les dessins, assez impressionné par le travail de la jeune femme. Il ressent une pointe de jalousie. Lui n'a jamais su dessiner. Il n'a jamais su se servir correctement de ses mains, même pour lire son écriture, il faut y mettre toute sa volonté; Il rend le bloc à la jeune femme avec un petit sourire :

- Tu veux faire les Beaux-Arts... Enfin, tu les fais, peut-être ?

Avait-il gaffé ?

Coline observe le jeune homme alors qu'il feuillette son bloc. C'est étrange comme sensation. Pour Coline, son bloc s'est un peu, son journal intime. Etrange à dire et à comprendre sûrement, puisque que ce n'est pas elle qui est représenté, mais après tout, un dessin comme un écrit reste subjectif même s'il tend à se rapprocher de la réaliter, elle se souvenait de ce que lui disait son prof de français sur Zola : ' Il voulait rendre une vision la plus près de la réalité possible, d'où le naturalisme, et pourtant, c'est un des plus important créateur de métaphores.' Et c'était vrai. Très difficile d'être objectif, et ça, dans quoi que ce soit.

"Je ne te l'ai pas caché, sinon, je l'aurais arraché du bloc et glissé dans mon sac."

Lui répondit-elle avec un sourire, elle n'avait pas trouvé necessaire de commenter la remarque de Guillemot sur son nez ... Le brun au cheveux en bagaille continu de regarder les dessins de la blondinette sans relever les yeux maintenant. Les Beaux-Arts ?! Oui, ça elle en rêve, encore faudrait-il que ses parents ne voient pas autre chose pour elle. Elle les detesterait de la priver d'un cursus artistique mais malheuresement l'indépendance et la fin de la tutelle parentale n'est pas avant trois années. Dure la vie.

"Les Beaux-Arts. Oui, j'aimerai beaucoup, mais mes parents ne sont pas encore convaincus ..."

Son ton était légèrement pointé de deception. Enfin elle se redressa pour être assise bien droite et remonta la chemise de son frère sur son épaule qui avait assez rougit pour la journée.

"Et toi, comment envisages-tu l'année prochaine ? A mon que tu l'envisages pas ?"

Les réponses de la jeune femme étaient trop concises, elle répondait à son ironie avec une simplicité très réaliste qui anéantissait les piques, non pas agressives pas taquines du garçon, et qui laissait planer une impression désagréable au jeune homme. Pire que mal les prendre et réagir au qui-vive, la jeune femme les ignorait, et ne semblait même pas les comprendre. Le jeune homme, un peu déconcerté par tant de pragmatisme, ne répond rien à la réplique de la jeune femme au sujet du dessin qu'elle n'avait pas caché.

Sur le sujet des Beaux-Arts, Guillemot sent qu'il a touché juste. La jeune femme lui répond qu'elle en rêve, mais que des études d'arts pour elle ne sont pas du goût de ses parents. Le jeune homme hausse les sourcils avec une petite moue de compréhension, et acquiesce :

- La vie serait tellement si facile si on nous laissait le choix après le bac... Et puis, c'est idiot, puisque c'est de notre vie que ça décide ! Pourquoi devons-nous encore être sous l'autorité de nos parents, prisonniers de leurs choix, alors qu'ensuite, pendant toute notre vie, on dépendra de ce choix ?!

Son ton s'était haussé, mais le jeune homme s'empresse de calmer son ardeur. Ses pulsions révolutionnaires lui étaient à la fois désagréables et euphorisantes, mais il n'avait pas envie de se donner en spectacle ici, malgré les regards intéressés dont le gratifiaient maintenant le groupe de musiciens, ainsi que quelques étudiants des Beaux Arts. La jeune femme lui demande ce que lui veut faire l'année suivante, et Guillemot hausse les épaules, avec un air vaguement morose :

- Si je réussit assez bien le bachot, mon père veut que j'intègre une hypokhâgne... Sinon, j'irais probablement en fac de lettres modernes, en bilicence : je suis assez bon en anglais.

Coline regarde le jeune homme élancé dans son discours engagé très amusée. Elle demande si elle peut poser sa tête sur les geoux du jeune homme mais n'attends pas la réponse de l'interréssé pour se servir de ses jambes comme d'un oreiller. La tête posait sous la tête de Guilemot, elle pose son regard sur lui avant de dire, bien trop vite à son gout, elle aurait préféré taire cette pensée mais bon :

"Mon frère pense la même chose que toi."

Hypokhâgne ?! Rien que ça, pensa la jeune femme légèrement admirative. Elle ne comprenait pas comment on pouvait se lancer dans de telle études, ni même comment on pouvait être bon en langue. Ca lui échappé et ça avait toujours été le cas. Elle savait à peine baraguiner quelques mots en anglais, et elle ne s'était jamais vraiment passionner pour les classiques bien qu'à ses heures perdues elle lisait certains romans de Hugo ... Mais, Zola, Balzac, Laclos, Voltaire, Montesquieu et tous les autres écrivains mort, eux lui avaient toujours parut d'un ennuie assomant, au grand desespoir de son prof de français de première. Mais, elle en avait fini du français à présent, son monde était rempli de dissections et d'expérience en tout genre. Le bonheur de sa filière D !

[C'est la filière C, pour les scientifiques :p]

La jeune femme lui demande si elle peut se servir de ses genoux, et Guillemot, pris par son discours enflammé, n'a pas la présence d'esprit de réagir avant que la jeune femme ne soit installée. Il la regarde avec un air un peu surpris. Il regarde autour de lui, mais le quai semble s'être débarrassé de toute personne de plus de 20 ans. Heureusement ! L'attitude de la jeune femme n'était pas vraiment acceptable, et Guillemot savait ce qu'il gagnerait si ses parents, aussi indulgents qu'ils puissent être, le voyaient. Finalement, il rapporte son regard sur la jeune femme, et dit, avec un sourire un peu timide, amusé, et hésitant :

- T'es un peu cinglée, toi.

Il décide qu'il s'en fiche, et voyant la jeune femme sourire. Relevant la tête, et l'écoute commenter son discours, disant que son frère est du même avis. Le jeune homme hausse un sourcil. C'est certain qu'il n'est pas le seul grand adolescent parisien à contester l'ordre en place. Il répond pourtant :

- Ah oui ? Il a quel âge ?

[ Non, les filières avaient des nom différents en fonction de la spé choisit ,et pour la bio, il me semble bien que c'est D. Je redemanderai à ma mère mais je suis presque sûre que c'est D, mais je peux me tromper =) ]

Coline fronça le nez. Cinglé, non elle pensait pas, il lui semblait qu'elle avait toute sa tête.

"Je dirais plutôt spontané, mais bon, j'ai peut-être l'air d'une cinglée comme, pourtant je suis très saine d'esprit."

La blondinette attrappa une mèche de ses cheveux qui s'était échapée de son chouchou pour, une activité particulièrement récurrante chez la jeune femme, la tresser. Tandis que Guillemot regarde dans tous les sens pour être sûr qu'on ne les arrêtera pas pour atteinte à la pudeur ?! Ca serait exagéré non ?!

" Dix-huit ans, on est jumeau, même si on se ressemble pas, aussi bien physiquement que de caractère."

Guillemot hausse un sourcil sceptique à la réponse de la jeune femme, mais ne formule pas d'autre réponse; Il observe la jeune femme attraper l'une de ses mèches blondes pour se mettre à la tresser avec une moue enfantine. Le jeune homme suit du regard les mouvement rapides des doigts fins de la jeune femme avec un air intrigué. Ses mains pataudes, arriveraient-elle à manipuler aussi rapidement et agilement les brins de crinière de Coline. Le jeune homme avait toujours était intrigué par la facilité avec laquelle les filles attachaient, défaisaient, tripotaient leur chevelure. Il attribuait ça à l'habitude, mais restait dubitatif.

Après avoir observé ses mouvements, et écouté sa réponse au sujet de son frère jumeau, le jeune homme attrape à son tour une mèche des cheveux couleurs paille de la jeune femme. Faisant attention à ne pas trop tirer, il bidouille pour se créer trois mèches plus petites, entre ses mains, et étudie de nouveau les gestes de Coline. Il essaye de le reproduire, mais rapidement, il se trompe de mèche, et lâche le tout, grommelant :

- Comment tu fais ça ..?

L'après-midi touchait à sa fin, et l'air commençait à se rafraichir. Le garçon, maintenant oisif, demande, sans réfléchir :

- Tu n'as nulle part où être ?

La présence de la jeune femme ne le dérangeait pas, et il ne savait pas d'où venait cette question désagréable. Elle lui avait juste échappé, dans un court moment d'exaspération inexplicable.

Coline continua de tresser ses cheveux défaisant et refaisant sans cesse la même mèche. Puis elle sentit deux autres mains s'aventurer dans ses cheveux. Elle bougea un peu pour regarder l'air très concentré du jeune homme tandis qu'il essayait de natter les mèches blondes, et bouffa quand il s'énerva.

"Regarde, soit tu passes toujours les cheveux par dessus, soit tu passes toujours les cheveux par en dessous, jamais les deux en même temps, et puis ça sert à rien de s'enerver. Remarque c'est mignon."

Lui lança-t-elle avec un petit sourire qui lui créa deux petites fossettes aux joues. La jeune femme regarda successivement sa montre, 18h47, et le ciel. Le soleil commençait à décliner et le ciel à roser. Nulle par où être ? La jeune femme se releva pour s'assoir et être à peu près à la hauteur du jeune homme. Et sans aucune animosité aucune :

"Je peux m'en aller si tu en as marre de moi."

Le jeune homme hausse les épaules avec un air vaguement morose, quand la jeune femme lui explique comment on natte. De toute façon, il s'en fiche, c'est un truc de filles. Il ne résista pourtant pas à l'envie de retoucher les cheveux de la jeune femme. Très rapidement, il le lacha de nouveau : de toute façon, il n'arrivait pas à les natter. Il reporta son attention sur les méandres de l'eau opaque du fleuve, plus bas.

Bizarrement, la jeune femme ne se vexa pas à la remarque, un peu acide, du garçon. Elle lui répondit juste, très posément, qu'elle pouvait s'en aller si il en avait marre d'elle. Comme elle s'était relevée, les jambes de Guillemot étaient de nouveau libres, et il put se relever.

- Non. Je dois y aller c'est tout, sinon, mes parents vont m'emmerder.

Il resta un instant debout comme un crétin, une nouvelle cigarette en main, puis marmonna, tournant les talons :

- Salut.

Inexplicable, l'attitude du garçon? Assez. Il marchait sur envies, et besoin, et là, il avait besoin de ne plus être avec cette étrange lycéenne.

Coline regarda le jeune homme se lever et s'éloigner. Elle était dessus, personnellement, elle se voyait mal rentrer maintenant chez elle, pour se retrouver seul avec le nain et les géniteurs ! Oh non ! La jeune femme sortit son bloc et arrache la croquis qu'elle avait fait de Guillemot. Avant d'inscrire derrière la page 'désolé d'être aussi relou, mais j'ai pas vraiment envie de me retrouver seule avec les autorités supérieurs qui me servent de parents !"
Puis elle courrut pour rattraper le jeune homme, balançant rapidement son bloc dans son sac, et son sac sur l'épaule !

"Tu as oublié ça."

Lui lança-t-elle en le rattrapant. Elle avait plié le dessin en deux laissant paraître son écriture ronde avec sa petit phrase écrite à l'arrache.

» Coline Maddon